Réflexion sur la domination des hommes sur les femmes[1]

Sources d’inspiration

Ce qui m’a inspiré pour écrire ce texte de réflexion :

  • Le livre La vraie nature de la bête humaine (2020) du biologiste et éthologue Cyrille Barrette;

  • Le livre Ce que les chimpanzés m’ont appris (2014) du biologiste et éthologie Daniel Paquette;

  • Le livre Le mythe de la virilité. Un piège pour les deux sexes (2017) de la philosophe Olivia Gazali;

  • Également, les échanges avec mon épouse Yolande Potvin féministe et historienne;

  • Mes travaux de recherche avec Denise Tremblay directrice générale de La Séjournelle, maison pour femme victime de violence conjugale et leurs enfants.

  • La révolte des femmes iraniennes concernant l’assouplissement des règles de morales et le droit à la liberté.

Une explication par l’origine biologique – notre double nature : animale et humaine

Barrette (2020), développe sa vision de biologiste et d’éthologue sur ce qu’il considère comme notre double nature, à savoir notre nature animale et notre nature humaine[2]. Comme le mentionnent  Paquette et Millet (2021) dans leur critique de la notion d’une « double nature »  « Barrette a le mérite de nous rappeler non seulement nos origines animales, mais que nous sommes toujours un animal » p.163.

L’évolution de notre espèce, le langage, l’éducation, la culture a fait de nous Homo sapiens une partie humaine qui doit s’allier avec notre partie animale, instinctuelle. Notre néocortex, par ses capacités d’analyse, de gestion, de planification, de raisonnement peut nous aider à gérer jusqu’à un certain point notre système reptilien (instinctuel) et limbique (entre autres l’ensemble des émotions).

Notre organisme a hérité d’une vie hormonale qui joue un rôle dans nos comportements d’homme (mâle) ou de femme (femelle). Également, la nature nous a pourvus d’un besoin fondamental de survie de l’espèce par la propagation de nos gènes. C’est le cas autant chez l’homme que chez la femme. Selon Barrette, chez les grands singes du moins, le mâle le manifeste par la recherche du plus grand nombre de partenaires afin de transmettre ses gènes, alors que la femelle le réalise par le choix du mâle le plus prometteur pour la qualité de gènes et aussi de sa force, de son courage, de sa dominance, etc.

Chez l’animal (le mâle) et chez l’homme une tendance a été héritée de l’évolution, soit la dominance sur les autres membres pour la nourriture, la reproduction et la recherche d’agrandir son territoire.  « La quête du pouvoir est omniprésente chez l’humain … c’est un héritage des primates… c’est l’abus de pouvoir qu’il faut dénoncer. La violence est un abus de pouvoir.[3]

Attention. La très grande différence avec les animaux, c’est le grand développement du néocortex, de la socialisation, de la coopération, de l’éducation et des valeurs dans la culture. Cet état de fait donne la possibilité à l’être humain de contrôler son ouverture à la domination, particulièrement chez les hommes.

J’ajoute ici les propos de Paquette, Brigras et Crepaldi *« Il convient de toujours demeurer vigilant face aux personnes qui tenteront de justifier les comportements humains et les inégalités sociales à partir des thèses évolutionnistes, car ces dernières nous parlent de prédispositions biologiques qui dépendent de l’environnement pour s’actualiser. Enfin, comme l’a dit Dawkins (1976), l’évolution nous a doté d’une conscience qui nous permet justement de faire des choix pouvant aller à l’encontre de nos prédispositions si nous le voulons.

Une explication par le piège du mythe de la virilité

En 2017 l’autrice et philosophe Olivia Gazali[4] a publié un excellent livre sur la question de la domination de l’homme sur la femme et l’infériorisation de la femme : le mythe de la virilité. Un piège pour les deux sexes. Olivia Gazali démontre que la supériorité virile s’est consolidée, siècle après siècle, par la mythologie (images, symboles), la métaphysique (les concepts), la religion (la loi divine), et la science (la physiologie). Les fondements communs de ces instances seraient que la nature a créé deux pôles diamétralement opposés, l’un étant fait pour se soumettre inconditionnellement (la femme) à l’autre (l’homme). Ce qui est bien entendu totalement faux.

Une explication par l’origine religieuse

L’infériorisation de la femme a été siècle après siècle conditionné par les religions, entre autres, par la Bible. L’histoire d’Adam et Ève est un bon exemple de la diabolisation de la femme. Comme le rapporte Olivia Gazali, le récit mythologique de la Bible fait d’Ève la tentatrice, celle par qui tous les malheurs arrivent, celle qui entraîne Adam et ses descendants dans la chute et les éloigne de Dieu.

Olivia Gazali, démontre comment ce système d’inégalité homme/femme s’est développé entre le troisième et premier siècle avant J-C. C’est à partir de cette époque que l’homme a remis en question le monde mixte ou les droits et libertés des femmes étaient beaucoup plus étendus et/ou la femme était respectée. Ainsi, une transformation se réalisa graduellement où dans ce Nouveau Monde la femme devenait infériorisée et enfermée tout en perdant tous ses pouvoirs.

 

Les diverses manifestations de domination et d’agression  

La recherche de domination et d’abus de puissance par l’autorité[5]. Ces récentes années nous avons découvert, suite à des divulgations de victimes d’agression sexuelle, que certains hommes puissants[6], ayant autorité sur les victimes ont abusé de leur pouvoir et agressé sexuellement des femmes.

Les agressions sexuelles par les pédophiles religieux. Que dire de toutes ces agressions sexuelles et ces violences faites aux enfants, garçons et filles, commis par des religieux qui profitaient de leur statut d’autorité et de prestige pour agresser. Les victimes, on le sait suite à de nombreux témoignages, ont vécu le massacre de leur vie entière, de leurs rêves. Les autorités de l’Église romaine catholique ont caché ces crimes, elles ont tout simplement déplacé les pédophiles dans d’autres paroisses et ceux-ci ont poursuivit leur agression. Les autorités religieuses demandaient à ces pédophiles de prier plus.

La violence faite aux femmes – la violence conjugale et les féminicides. J’ai l’opportunité de collaborer à de la recherche et développement en violence conjugale, et ce depuis plus de 20 ans. Le modèle théorique et pratique créé par La Séjournelle avec Denise Tremblay se nomme Processus de Domination Conjugale (PDC). La VC est vue comme une domination du conjoint violent (habituellement l’homme) envers la conjointe. Cette violence et domination peut se faire dans différentes dimensions de la vie du couple et de la famille : relationnelle, économique, sexuelle, etc. Elle a aussi de graves conséquences non seulement sur la femme victime, mais aussi sur les enfants.

 

Les solutions

L’éducation des garçons et des filles. Tant en éducation familiale qu’en éducation à l’école, il est urgent d’apprendre aux jeunes la résolution de conflit par une approche pacifique; par l’apprentissage de la gestion des émotions, particulièrement de la colère. Offrir aux adolescents et aux adolescentes de l’information sur les signes et les conditions d’une saine relation amoureuse, les signes de domination, etc.

Les mouvements #MeToo. Le dévoilement des abus, des agressions. La grande importance d’encourager et de soutenir les mouvements de type #MeToo. Ne rien laisser passer sur les abus et les agressions.

La prise de position des hommes. Le problème de la violence faite aux femmes doit être dénoncé aussi par les hommes. Faire savoir que comme homme on désapprouve les abus, la domination et les agressions envers les femmes. Qu’on appuie les femmes et le mouvement féministe dans cette cause.

Le rôle du père auprès de son fils. Le père a un rôle important à jouer dans le développement de la gestion de la violence chez les garçons. Il doit être un modèle dans sa relation avec sa conjointe (la mère) et avec les femmes et transmettre à son fils les comportements souhaitables, la façon de régler pacifiquement les conflits, la façon de gérer la colère.

L’investissement à la fois dans les maisons pour femme victime de violence conjugale et pour le traitement des hommes violents envers les femmes. Bien entendu qu’il faut poursuivre l’investissement dans les organismes d’aide aux femmes victimes de violence, mais il faut aussi intervenir à la racine et aider les hommes aux prises avec un problème de violence conjugale. Il existe au Québec des organismes d’aide aux hommes, il faut les soutenir davantage et favoriser la création de nouveaux services.

 

 


 

[1] Dans ce texte de réflexion sur la violence des hommes envers les femmes, j’aimerais préciser que tous les hommes ne sont pas violents. Certains hommes sont dominants, abusent de leur domination et sont violents. Ceci dit, il est inacceptable que dans notre société du 21e siècle, que les hommes soient violents et tentent de dominer les femmes et qu’il n’y ait d’égalité homme/femme.

[2] Lire la critique de Paquette, D. et Millet, J (2021) L’humain ne peut s’affranchir de la nature. Revue de psychoéducation. Vol 50, (1) 157-166.https://www.erudit.org/fr/revues/psyedu/2021-v50-n1-psyedu06023/1077077ar/

[3] Daniel Paquette (2015). Ce que les chimpanzés m’ont appris du biologiste et éthologie. MultiMondes. (p. 91)

[4] Gazali, O. (2017). Le mythe de la virilité. Un piège pour les deux sexes. Robert Laffont.

[5] Autre article : https://pierrepotvin.com/wp/index.php/2017/11/04/debat-de-societe-agression-sexuelle-abus-de-pouvoir-et-relation-homme-femme/

[6] Le grand producteur Hollywoodien Harvey Weinstein, une figure adulée d’Hollywood. Puis ici au Québec des accusations de deux grands producteurs dans le monde artistique : Gilbert Rozon (Production Juste pour Rire) et Éric Salvail (animateur et producteur d’émissions de variétés à la télévision). Et bien d’autres depuis.

* Paquette, D.,  Brigras, M. et Crepald, M. A. (2010). La violence : un jugement de valeur sur les rapports de pouvoir. Revue de psychoéducation. 39, (2), 247-276. (p. 259)

2 réflexions au sujet de « Réflexion sur la domination des hommes sur les femmes[1] »

  1. La violence envers les femmes découle du système patriarcal. Tant que le système patriarcal sera présent, il soutiendra et concentrera le pouvoir entre les mains des hommes. La violence envers les femmes est un comportement appris et utilisé comme moyen de contrôle et de domination. Elle prendra fin uniquement lorsque les stéréotypes sexuels disparaîtront et que le modèle dominateur/dominée cessera de régir les rapports entre les femmes et les hommes.

  2. ET SI LA SOCIÉTÉ AVAIT TORT…EN SUBORDONNANT LES DIFFÉRENCES
    ET SI LA RELIGION AVAIT TORT…EN CONTROLANT LA SEXUALITÉ
    ET SI LA CULTURE AVAIT TORT…EN IMPOSANT SES RÈGLES
    ET SI L’HUMAIN AVAIT TORT…DE SE PAVANER PARMI LES ESPÈCES
    ET SI J’AVAIS TORT…DE PENSER AVOIR RAISON

    Claude Pelletier
    Mtl

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *